Moins de deux ans après le premier volume, Victor Norek, alias Le CinématoGrapheur, publie chez Third éditions la suite et fin de son analyse de l’œuvre de Steven Spielberg sous le titre : L’œuvre de Steven Spielberg, l’art du blockbuster, volume 2*. Soit 500 pages bien tassées et illustrées de nombreux photogrammes en noir & blanc qui plongent le lecteur dans l’univers du cinéaste emblématique. Comme dans le premier volet, l’auteur se focalise de manière claire et didactique sur la mise en scène en décortiquant film par film la réalisation de Spielberg, les symboles et les métaphores qu’il exprime visuellement à travers le langage du cinéma.
Par le prisme d’axes thématiques transversaux, ce second volume analyse dix-sept longs-métrages du cinéaste, parmi lesquels : Jurassic Park, La Liste de Schindler, Il faut sauver le soldat Ryan, A.I. Intelligence artificielle, Les Aventures de Tintin : Le Secret de la licorne, ou encore Ready Player One.
La reconnaissance de l’importance du papa de E.T. dans l’art cinématographique, certes plutôt tardive, n’a cessé de s’intensifier ces dernières années, notamment grâce à de nombreux documentaires et publications en tout genre. On célèbre cette année les cinquante ans des Dents de la mer – avec à la clé un documentaire à venir signé Laurent Bouzereau. Le film à l’origine des blockbusters d’été bénéficie dans ce nouvel opus d’une analyse en profondeur qui souligne à quel point Spielberg a intégré l’héritage d’Alfred Hitchcock pour le faire sien et a interrogé, ce faisant, la place du spectateur dans la narration. Connu pour ses analyses fines et didactiques sur sa chaîne YouTube, Victor Norek fait preuve à l’écrit de la même exigence.

A plusieurs reprises, l’auteur cherche à corriger certaines idées fausses liées aux films de Spielberg, notamment Hook (1991) qui a fait l’objet depuis bien avant sa sortie de nombreuses rumeurs et informations erronées qui ont fini par forger la légende du film.
Parmi d’autres, le chapitre consacré à Ready Player One (2018) éclaire la démarche du réalisateur et sa position vis-à-vis des cinéastes qui l’ont précédé. C’est « l’œuvre testamentaire d’un artiste dont le plus grand rêve était de devenir un cinéaste classique, comme ses idoles : Ford, Capra et Lean. Or, il est devenu pour le monde entier un réalisateur de films pour enfants, icône d’un genre dans lequel il voulait à tout prix ne pas être enfermé, et dont il n’a cessé d’essayer de se sortir », écrit Victor Norek. L’auteur fait un parallèle entre le cinéaste et Halliday, le héros du film : « Son œuvre l’a totalement dépassé et il s’y retrouve confronté au crépuscule de sa vie. »
Le long chapitre sur A.I. Intelligence artificielle montre à ce titre à quel point le cinéaste ne peut « se débarrasser du fantôme de Stanley Kubrick », une filiation qui a débouché sur la séquence hallucinante qui se déroule littéralement dans The Shining (1980) dans Ready Player One.
Accessible et agréable à lire, ce deuxième tome foisonnant permet de mieux apprécier – désormais dans sa globalité – la cohérence et la grande richesse de l’œuvre du cinéaste américain, et de constater à quel point elle dialogue avec certains grands films de l’histoire du cinéma.
*Les illustrations des deux tomes sont signées Ben Turner.