En novembre 2025, cela fera cinquante ans que François de Roubaix nous a quittés. En 1975, le compositeur disparaissait dans un accident de plongée, au fond d’une grotte de Tenerife. Pionnier du home studio, poète de l’électronique, sans cesse samplé et remixé par les nouvelles générations, François de Roubaix a marqué de son empreinte une décennie prodigieuse (1965-1975), avec plusieurs bandes (très) originales, associées à des comédiens comme Delon, Ventura ou Belmondo : Les Grandes gueules, Le Samouraï, Dernier domicile connu, La Scoumoune…
Autodidacte génial, De Roubaix avait une conception très personnelle de la musique qui consistait à faire tomber les barrières pour favoriser l’exploration et l’expérimentation. « En fait, disait-il, ma démarche, c’est de mélanger deux genres, musique traditionnelle et musique électronique. J’essaye de créer une sorte de pont entre le folklore et la recherche. »
La session d’écoute dédiée au compositeur que j’anime cet après-midi au Listener est l’occasion de se pencher brièvement sur sa biographie. François de Roubaix, né le 3 avril 1939, est le fils de Paul de Roubaix, producteur de films institutionnels, et de Mimma Indelli, artiste peintre et créatrice de dessins animés. Durant son enfance, il développe une passion pour la musique après avoir reçu un harmonica de sa grand-mère, et découvre également un amour pour la mer, initié par sa mère lors de vacances à Toulon et Saint-Raphaël. Dans les années 1950, sa famille acquiert une propriété en Corse, qui deviendra son refuge tout au long de sa vie. François s’immerge dans le jazz, jouant de la guitare et du trombone, et fonde l’orchestre New Orleans College avec des amis. Il accompagne des artistes renommés comme Bill Coleman et Albert Nicholas. Après une brève carrière aux Jeunesses Musicales de France, il suit son père en Afrique sur des tournages, se familiarisant avec divers métiers techniques du cinéma. Sa rencontre avec le réalisateur Robert Enrico marque le début de sa carrière de compositeur pour le cinéma, collaborant sur des courts métrages et des longs métrages tels que Les Grandes gueules (1965) et Les Aventuriers (1967). Il compose également pour la télévision, notamment pour la série Les Cinq dernières minutes, et s’illustre dans la publicité, notamment avec les Films Jean Mineur.

De 1964 à sa disparition en 1975, François de Roubaix signe les bandes originales de 35 longs métrages, en plus de nombreuses compositions pour des courts métrages, des publicités, des documentaires et des séries télévisées. Il est reconnu pour sa capacité à créer des atmosphères musicales uniques, mêlant instruments traditionnels et électroniques, laissant une empreinte indélébile dans le paysage musical français et mondial. Si de nombreux musiciens ont pioché dans son œuvre pour pimenter la leur, c’est qu’il faisait preuve d’une modernité bien en avance sur son temps, rendue encore plus incontournable par le passage du temps. Toujours loin des chapelles, rejetant toute convention, il déclarait : « De mon point de vue, ce que l’on appelle communément « musique contemporaine » correspond en réalité à la musique de recherche. La vraie musique contemporaine, c’est la musique vivante d’aujourd’hui, le jazz ou la pop, celle des Beatles ou des Pink Floyd. »
Sa disparition a mis un coup d’arrêt brutal à une carrière qui l’aurait certainement vu explorer de nouvelles voies musicales.
En avril 2025, Universal Music France (Panthéon-Decca) publiera pour la première fois en version intégrale une bande originale culte de François de Roubaix, complétée de nombreux inédits et remixes.
Rendez-vous dimanche 9 février à 15h30 pour rendre hommage à ce compositeur de génie au Listener, 10, rue Vivienne, Paris 2e.
Les citations sont extraites du livret du disque Le Monde électronique de François de Roubaix paru chez Universal Music en 2004, dans la collection Écoutez le cinéma pilotée par Stéphane Lerouge.
Merci Jean-Christophe pour ce moment très agréable et ce bel hommage musical à ce grand compositeur trop tôt disparu qu’était François De Roubaix. Merci également de m’avoir gentiment dédicacé vos deux ouvrages de qualité sur Ennio Morricone et John Williams.