Des voitures qui glissent maladroitement, des visages dont les traits se transforment comme dans une hallucination, des figures à la fois familières et différentes, autant de visions venues d’un monde étrange, une dimension parallèle dans laquelle nos films et séries préférés auraient été conçus dans les années 1950. A l’aide de logiciels d’IA générative, Abandoned Films s’amuse à leur créer de fausses bandes-annonces.
Bienvenue dans une réalité alternative où The Terminator serait signé par Fritz Lang ou Star Wars par Akira Kurosawa. Si certains sont ratés (Indiana Jones Raiders of the lost ark), d’autres se révèlent drôles (Pee Wee’s Big Adventure), voire fascinants (Dune).
Le familier devenu étrange, voire inquiétant, tel que le décrivait Freud dans son essai L’inquiétante étrangeté paru en 1919, s’applique très bien aux fausses bandes-annonces d’Abandoned Films et à celles d’autres studios exploitant la même veine (comme ici Inception réalisé par Alfred Hitchcock). « Cette variété particulière de l’effrayant qui remonte au depuis longtemps connu, depuis longtemps familier », dit Freud. Il y a en effet quelque chose d’effrayant dans ces images presque familières conçues par des machines pilotées par des hommes, car justement, elles n’auraient pas pu être créées par l’homme. Cela tient justement du fait que ces personnages, ces décors, ces scènes sont “mal faites”, elles sont reproduites d’une façon distordue, décalée, voire monstrueuse.
Un caractère “imparfait” certainement lié au stade encore peu avancé des logiciels d’IA, lesquels ne tarderont pas à gommer ces imperfections qui en font pourtant, à ce stade, tout le charme. Pour fascinantes qu’elles soient, ces fausses bandes-annonces s’avèrent aussi répétitives tant elles sont déclinées selon le même gimmick : voix et musique désuètes, imperfections de la pellicule, présentation didactique des personnages…
Une histoire du cinéma parallèle est en train de s’écrire, avant qu’un jour prochain l’inévitable ne se produise : un long métrage de fiction entièrement généré par une machine. Alors, l’imagination humaine sera défiée par celle des machines, et un “art artificiel” verra le jour.